Mon petit loup,
J’essaie de trouver le courage d’écrire cet hommage, mais c’est difficile. La culpabilité est toujours là, le poids de cette décision que j’ai du prendre pour toi, pour ton bien, sans toutefois être convaincue que je faisais le bon choix. C’est la première fois que j’ai autant hésité, la première fois que je me suis dit « est-ce que c’est vraiment la meilleure chose à faire pour lui ? »
Je ne sais toujours pas si j’ai pris la bonne décision, mais j’espère que tu sais que tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour toi. Je m’étais jurée de ne jamais m’acharner, de ne jamais vous laisser partir seuls, après des jours à vous battre dans un environnement hostile, inconnu, loin de vos copains. Je me raccroche à ça, chaque jour je me dis « tu as pris la meilleure décision pour lui », mais comment en être sûre ? Et toi, est-ce que tu le sais que j’ai fait cela pour toi ? Parce que je ne voulais pas t’abandonner… C’est ironique quand on sait que c’est moi qui t’ai tué…
J’aimerai t’écrire un bel hommage, mais je suis rongée par la culpabilité. Les jolis souvenirs que j’ai de toi restent enfouis au fond de moi, dès que je pense à toi, je me dis « et s’il avait voulu vivre ? », « et si on avait tenté le traitement ? »
Ta copine Ysera, avec qui tu partageais quasiment tous les instants de la vie, est bien triste sans toi. Elle ne veut plus sortir de la cage, elle tourne en rond. J’ai l’impression de lui avoir arraché ce qu’elle avait de plus précieux…
Depuis ta castration, tu as toujours été un rat très en retrait, surtout après la perte la même année de tes 5 compagnons de cage. Partageant ton temps libre entre manger et dormir collé à Ysera, je n’ai pas beaucoup de souvenirs de toi en train de vadrouiller dans la maison, ou de faire des bêtises. Tu ne sortais que pour venir prendre le petit déjeuner sur mes genoux, piquer un petit bout de croissant ou un peu de margarine. T’étais grassouillet, un peu trop peut-être, tu ne faisais pas beaucoup de sport, t’étais d’ailleurs pas très adroit 🙂
Mais qu’est-ce que t’étais gentil mon loulou, toujours à venir faire des bisous quand on te gratouillait la tête. Tu ne cherchais jamais les embrouilles, t’étais sage au fond de ta cage.
Tu as commencé à perdre tes pattes arrières à l’approche de tes 2 ans, puis le déclin a été très rapide, jusqu’à ce que tu perdes complètement l’équilibre et n’arrive même plus à manger solide.
On a tenté un traitement à la cabergoline, qui t’a redonné un peu de vie pour dix jours… J’y ai cru, parce que je t’ai vu déplacer des montagnes à ce moment-là. Tu n’avais plus de pattes arrières, mais tu avais retrouvé assez de forces pour monter sur le canapé tout seul. C’est étrange, car je ne t’ai jamais vu bouger autant que durant ces dix jours.
J’étais obligée de te prendre des bains, tu n’aimais pas trop ça, mais le moment qui suivait après, rien que tous les 2, avec toi enroulé dans la serviette, c’était du bonheur pur, on restait assis longtemps comme ça, tu fermais les yeux et tu t’endormais sous mes caresses.
Ce dernier soir, il y avait quelque chose de différent. Je t’ai pris ton bain, je t’ai séché, câliné, longtemps, une demie heure, une heure… Je t’ai rentré dans la cage, mais tu es ressorti immédiatement, et tu as donné tout ce que tu avais pour me rejoindre sur le canapé et réclamer des câlins. C’est bizarre comme on peut sentir qu’il y a un problème à l’affection que donne et que demande un rat…
Quelques minutes plus tard, tu as fait des convulsions, tu te tordais, tu cherchais ton air, tes yeux ressortaient… Le temps d’arriver à la clinique, tu avais repris tes esprits, mais je savais que je repartirai sans toi. La vétérinaire dit que la tumeur a gonflé, qu’elle presse maintenant des zones importantes de ton cerveau. Que l’on peut tenter un traitement à l’issue incertaine pour faire dégonfler la tumeur et t’offrir un petit peu de répit.
Je n’ai pas voulu te laisser seul à la clinique, je n’ai pas voulu tenter un traitement qui ne donnerait peut-être rien et qui te maintiendrait en vie pour quelques heures, quelques jours. Je n’ai pas voulu repartir avec toi à la maison, au risque que la prochaine crise de convulsion ne me laisse pas le temps de t’emmener chez le vétérinaire.
J’avais l’impression de t’envoyer à l’abattoir, de me débarrasser de toi. Mais j’ai pris cette décision avec tout l’amour et tout le respect que je te porte. Je ne voulais pas que tu souffres. Et toi, tu m’as fait des bisous jusqu’au dernier moment… Des bisous que je ne savais pas interpréter… « veux-il se battre ? », « est-il d’accord pour qu’on arrête là ? ». J’ai pris ma décision sans arriver à comprendre ce que toi, tu voulais.
J’avais oublié durant cette année sans décès à quel point c’est dur de vous dire au revoir, quel vide vous laissez dans mon cœur. J’essaie d’apprendre à vivre sans toi mon petit Kal, mais c’est difficile. J’espère que tu sais à quel point je tiens à toi, que tu es parti avec une image positive de moi et que jamais tu ne t’es cru abandonné…
Repose en paix mon petit cœur, j’espère que tu as retrouvé tes comparses et que vous faites les fous là-haut. Et veille sur tes 2 compagnons s’il te plait, j’ai encore besoin d’eux.